Transférer la conscience de la personne décédée

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Jigme Lingpa

Amitābha, Bouddha de Lumière Infinie

Transférer la conscience de la personne décédée

par Jigmé Lingpa

Avant de transférer la conscience de la personne décédée, commencez par dire son nom un nombre approprié de fois.

[Nom de la personne décédée], ayant fait l’expérience de l’impermanence, tu es maintenant mort-e.

Répétez trois fois.

Tu n’es pas la seule personne à avoir fait l’expérience de ce que nous appelons la « mort » ; c’est la voie que doit suivre tout un chacun parmi les cinq sortes d’êtres animés [1]

Une fois la naissance advenue, la vie ne peut se terminer que par la mort ; telle est la nature des choses. Il n’y a pas un seul être en ce monde, du plus riche et puissant monarque universel au mendiant mourant de faim incapable ne serait-ce que de se nourrir, qui ne soit exempt de vie et de mort donc ne désespère pas.

Sois conscient-e que rien de ce à quoi tu es attaché-e (ta famille, tes amis, ta maison, ta richesse, tes possessions, etc.) ne peut te suivre. Comprends que le temps passé avec eux est maintenant terminé. Comme il est dit :

Quand le temps est venu, même un roi doit mourir,
Et ni ses amis, ni sa richesse ne peuvent le suivre.
En ce qui nous concerne, où que nous demeurions, où que nous allions,
Le karma nous suit comme une ombre [2]

Maintenant que tu fais personnellement l’expérience du mûrissement de la vérité de la souffrance décrite dans cette strophe, qui est la nature-même des choses, le danger est que ton attachement à tes proches, à ta richesse et à tes possessions te conduise dans un monde inférieur. C’est pourquoi, dans le Sūtra à la demande de la fille du nom de Ratna[3], le Bouddha a dit :

A cet instant, ton père, ta mère, ta famille,
Tes amis ou les gens qui te sont proches ne peuvent t’offrir nulle protection.
Fils et filles n’offrent aucun refuge.
Seuls ceux dotés de grandes qualités peuvent accorder leur protection,
Tout protecteur mondain en est incapable.

Nous devrions nous réjouir d’être en mesure de faire l’expérience de la mort et du transfert en cette époque bienheureuse où les enseignements du Bouddha existent dans ce monde. Pourquoi ? Parce que le seul fait d’entendre les noms des bouddhas bhagavān est très puissant. Cela veut dire que celles et ceux qui décèdent en entendant ces noms tout en ressentant foi et joie éviteront les renaissances inférieures et atteindront le niveau d’un dieu ou d’un être humain. Comme le Bouddha l’a dit dans Les cent actes :

“Moines, avez-vous remarqué un oiseau qui s’est envolé du ciel pour atterrir en ma présence? »
« Oui, Ô Béni, nous l’avons vu.”
“Ô moines, alors que cet oiseau repartait, empli de joie à ma pensée, il fût tué par un faucon, mais comme il est mort empli de joie à ma pensée, il a repris naissance dans la famille d’un marchand, ici à Rājagṛha. Lorsqu’il a grandi, il s’est mis à suivre mes enseignements. Après avoir avancé, bien qu’il n’ait eu alors que 7 ans, il s’est débarrassé de toutes les émotions afflictives et est devenu un arhat. »

Un seul instant de foi dans le Bouddha peut apporter de tels bienfaits. Tu as la chance d’avoir pris naissance dans un monde où les enseignements du Victorieux sont présents, d’avoir entendu le nom du Bouddha et de reconnaître la valeur de ses enseignements. Ainsi, avec sincérité, engendre une plus grande foi encore à l’égard de ton maître, le Tathāgata, prends refuge dans le Dharma, son enseignement parfait, et imite le saṅgha des bodhisattvas.

Le protecteur Amitābha en particulier a promis que toute peur dans les bardos et toutes causes de renaissance inférieure seraient complètement éliminées pour quiconque se rappellerait ou entendrait son nom et demeurerait dans la vue. Ainsi, remets-t’en à lui et aux bodhisattvas Avalokiteśvara et Mahāsthāmaprāpta, et n’oublie pas leur terre pure, Sukhāvatī.

Comme tu es maintenant libéré de ton corps physique fait de chair et de sang, vas directement dans cette suprême terre pure.

Pense au gourou envers lequel tu nourris de la dévotion et médite sur lui. Rappelle-toi ton yidam et la vue. Médite sur la bodhicitta d’aspiration et d’action du Mahāyāna.

Une méthode pour créer les conditions favorables grâce à ces points-clé est l’instruction du transfert qui amène l’éveil sans méditation et qui s’applique à la jonction entre une vie et la suivante. Médite, par conséquent, sur une syllabe « a » blanche dans ton cœur. Alors que je répète le son « a », amène dans ton expérience tout ce que je viens de te dire. Considère que le « a » (dans certains cas, vous pouvez aussi le changer en « hrīḥ ») va directement dans la terre pure de Sukhāvatī, telle une flèche décochée par un puissant archer.

Dites ceci pour inspirer la personne décédée et actualisez-le vous-même. Puis, répétez « a » autant de fois qu’il y a d’années dans l’âge de la personne, d’une voix au ton doux. Puis tirez les cheveux au sommet de la tête de la personne et répétez « a » encore vingt-et-une fois. Grâce à cela, elle sera conduite vers une renaissance supérieure. Comme le Tantra de l’union du soleil et de la lune [4] le dit :

Appliquez la syllabe « a »,
Combinée au souffle autant de fois que l’âge de la personne.
Si elle ne meurt pas à cet instant-même,
Alors, en orientant votre souffle vers le sommet de sa tête,
Amenez sa conscience au milieu de son corps
Tout en vous concentrant sur la syllabe « a ».

Et:

Pratiquant ainsi,
Si la personne mourante respire toujours,
En calquant la syllabe sur le souffle,
Les états seront purifiés – cela ne fait aucun doute.

Ainsi, calquer « a », la syllabe non-née, sur l’expiration, une fois que le processus de dissolution a commencé à se manifester, est une instruction extrêmement profonde.

Mettez l’accent sur les moyens habiles (en guidant avec grande compassion) et sur la sagesse (en vous fondant à l’étendue semblable à l’espace). A ce stade, vous pourriez aussi pratiquer de manière plus élaborée en appliquant l’une des nombreuses formes de transfert correspondant à la perception d’autrui. Dans tous les cas, bloquez l’entrée des mondes inférieurs au moyen des noms des bouddhas, ainsi que des mantras, dhāraṇīs et aspirations spéciales formulées par les bouddhas. Gardez à l’esprit qu’il est difficile de guider celles et ceux qui n’ont aucune expérience de la pratique spirituelle à travers la phase de développement, et de les introduire à l’apparence, à l’accroissement et à l’obtention, etc., car il est très difficile de communiquer avec celles et ceux qui se trouvent dans l’état absent de l’ālaya.

A la requête de Losal, ceci fût rédigé par Rangjung Dordjé.


| Traduit de l’anglais par France Manghardt et Ane Samten Palmo.


Version : 1.0-20230524


  1. Les dieux, les humains, les animaux, les prétas et les êtres des enfers.  ↩

  2. Tiré du Sūtra des conseils au roi (Rājāvavādakasūtra).  ↩

  3. Ratnadārikāparipṛcchā-sūtra (bu mo rin chen gyis zhus pa’i mdo), autre titre donné à l’Instruction au sujet du Mahāyāna (mahāyānopadeśa sūtra, Toh 169).  ↩

  4. Le Tantra de l’union du soleil et de la lune (nyi zla kha sbyor gyi rgyud) est l’un des dix-sept tantras de la Grande Perfection.  ↩

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